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La Gazette Drouot N°8 - du 24 Février 2017

Anne Deval Sculptures

L'œuvre d'Anne Deval (1947-2016) renoue avec les grands mythes méditerranéens. C'est dans le sud de la France, qu'elle s'initie seule à la terre chamottée qu'elle adopte comme matériau pour exprimer une humanité éternelle et Vulnérable. Elle modèle la terre de Bollène d'où naissent de grandes figures hiératiques - cariatides, statues colonnes au drape mouillé, vestales. Guerriers acéphales, corps pris dans une saine minérale, à la fois organique et architecturale, femmes gardiennes de la mémoire de la Terre. Dans la chair de l'argile, Anne Deval inscrit tout un répertoire de signes avec un stylet ou des spatules. Une humanité de chair figée dans la terre cuite à 1200 degrès. Ville étreinte comme Paysage intérieur sont tour à tour une nontagne anthropomorphe, une falaise aux strates épidermiques. Les dernières années, alors que l'artiste, revenue à Paris, travaille dans son atelier du Kremlin-Bicêtre depuis 1990, un chœur antique s'est ordonné dans l'atelier. De grandes figures féminines se sont réunies pour un dialogue silencieux et initiatique qu'elles poursuivent dans la galerie. Elles retrouvent les héros emblématiques d'une mythologie mémorielle, Antigone, Jason, Sémélé. L'exposition présente une anthologie des sculptures d'Anne Deval, femme sculpteur secrète qui interroge avec ses œuvres, la vie, le destin des hommes et des femmes, dans une quête de beauté qui est sa réponse au chaos menaçant.

L. H.

Ariatides libérées de toute nécessité de ne porter autre chose qu'elles-mêmes. les sculptures d'Anne Deval se sont affranchies.
Dans cette nouvelle époque, elles vont seules ou en groupe, peut-être... à la plage ! Elles ont prêté aux gestes de l'artiste leur dénuement, leurs drapés, leurs parures avant de se confier à la magie du feu. Guerrières et vestales élancées, le Soleil fige au sol leurs longues ombres droites. glisse entre leurs fissures, s'accroche à l'un ou l'autre des petits éclats bleus calcinés. Elles sont faites pour recevoir la coulure de l'eau, du Soleil et du temps - abandon féminin à la Sensualité des éléments-, faites aussi pour donner l'ocre aux verts de nos régions, une échelle aux grands feuillus et pour rendre hommage aux déesses...
Elles pourraient être du désert, des bords de la mer Egée, cependant nombre d'entre elles habitent déjà nos fontaines et se prêtent aux jeux d'eau. L'exposition "Sans doute, iront-elles à la plage ...» est l'expression d'une sérénité et d'un apaisement. Chacun aura compris qu'aller ou ne pas aller à la plage ne changera rien, toute fonction dramatique étant provisoirement suspendue, dans un temps Strictement élégiaque.

Claudine Mulair

Les pièces qui sortent du four sont des sculptures. Façonnées en terre de Bollène, figées par le feu dans une matière immémoriale, ces œuvres sont animées d'efforts cyclopéens dont les tensions conjuguent l'apparition de corps dansants. En couple ou solitaires revêtus d'une carnation d'ocre minéral pigmenté d'éclats météoritiques de fer calciné, ils sont saisis d'un le cours d'une étreinte ou d'une marche. Ce sont des êtres titanesques surgis de vestiges architecturaux, de décombres monumentaux, de ruines hiératiques des cités imaginaires de la mémoire et de l'oubli, dont l'agencement puissant génère le retour à la vie. Debout, en action. Leur membres inférieurs arrachés á l'immobilité téllurique des décombres qui les musclent et les charpentent, poursuivent dans les torses, par les bras et la naissance des têtes, un mouvement d'éclosion. Les proportions, rigoureuses révèlent une maîtrise du geste et de l'anatomie ainsi qu'en témoignent les études de modelés -les gammes de l'artiste- qui sont présentées à côté. Deux intentions contraires se sont fondues dans un seul jaillissement, le destin des ruines immobilisées dans l'usure continue et la naissance des corps, leur plastique fluide prête à marcher, comme si la sculpture, aujourd'hui comme hier, naissait toujours de la ville, creuset de l'avenir de l'espèce et lieu de Sa more

Ernest Bens - 20 Mars 1994